Impulsivité dans au moins deux domaines potentiellement dommageables pour le sujet (par exemple : dépenses excessives, sexualité, toxicomanie, alcoolisme, jeu pathologique, conduite automobile dangereuse, crises de boulimie ou d’anorexie) ;
Ma sexualité a toujours été compliquée. Je suis passée du mouton noir, de la personne à ne jamais toucher, à être désirée et parfois me sentir désirable. Encore, je ne le crois pas vraiment. Si mes copains ont toujours été assez jaloux, disant que je me fais beaucoup regarder, moi je ne le vois même pas. J’ai l’impression d’être invisible, que je sois célibataire ou non.
Le problème, c’est que ma sexualité est devenue un outil et une finition. J’utilise ma sexualité comme appât, comme arme, comme vengeance… Mais elle aussi d’une importance capitale envers moi-même, car elle est maitresse de mon humeur. Et elle ne peut pas toujours être satisfaite de l’activité individuelle. Même qu’après un certain temps, la masturbation en elle-même peut devenir très frustrante. Un peu comme un régime devient très difficile à vivre quand on n’a pas le droit à un peu de triche.
Ce que la majorité du monde, même mon médecin, a de la difficulté à comprendre, c’est que l’envie finit par devenir physique et vraiment intense. J’ai l’impression d’être dans une famine de sexe. Mon corps se retrouve centré sur mon vagin, comme il se retrouve centré sur l’estomac quand on a faim. Évidemment, l’esprit devient aussi obsessif face au problème. Et dans certains cas, j’aurai beau prendre n’importe quelle médication pour dormir, je n’y arriverai pas, ou bien je passerai une nuit à rêver de façon compulsive à seulement ce sujet.
Cette obsession sexuelle est assez facile à expliquer pour moi. Ma vie amoureuse et sexuelle se définit par une inexistence non choisie et douloureuse, ou par divers scénarios où l’on a profité de moi. J’ai rarement eu une sexualité POUR moi.
Parce que durant toute ma vie on m’a diminué à être laide, grosse… d’aucune valeur… qu’on m’a ostracisée au point où je ne pouvais m’imaginer avoir un peu d’attention masculine… j’ai fini par prendre n’importe quelle attention qui pouvait passer… et certainement pas imaginer que ceux dont moi je voulais, voudraient bien de moi.
J’ai été violée, abusée, utilisée. Et ça n’a jamais eu de lien causal avec la présence ou non d’amour, comme certains pourraient le penser. C’est plutôt en lien direct avec le respect. Une histoire d’un soir peut donner plus de respect qu’un conjoint de longue date. La police peut nous sortir pour notre sécurité d’une relation de longue date, et on peut créer une belle histoire d’amour sur une histoire d’une nuit.
Avant ma première relation, je n’étais pas tant sexuelle. Dans ma famille, nous ne sommes pas vraiment prudes, et les relations sexuelles ne sont pas le mal incarné. Par contre, avant mon premier amoureux, je ne me touchais même pas, et je n’avais pas une envie particulière de faire quoi que ce soit de sexuel. À ce moment-là, je voulais simplement vivre comme tout le monde les petites « amourettes » adolescentes. Découvrir, au même rythme que les autres, chaque étape des relations amoureuses.
Les premières fois ont été relativement agréables, puisque je ne connaissais pas mieux. À ma fête, par contre, S. me réservait le double de son 5 minutes habituel. Pour des raisons que j’ignore, j’avais de grosses douleurs vaginales ce soir-là. Je lui ai dit. J’ai tenté de le pousser, mais je n’avais pas assez de force. Je n’ai pas crié… je ne voulais pas réveiller la maison. Mais lui, il le savait. Lui, je lui disais. Il a continué tout de même. Je ne pouvais pas être plus contente qu’il soit précoce. Au moins ça n’avait pas trop duré.
Quand j’ai vu mon médecin, j’avais des crevasses, elle m’a dit. Il m’avait blessé par en dedans, mes deux dedans. Ça a duré quelques années… « Heureusement », j’étais encore une intouchable pour les gens.
Quand les autres lui ont dit pourquoi je le laissais, soit cet épisode d’abus, il disait qu’il ne savait pas de quoi je parlais. Je ne sais pas s’il est idiot à ce point, ou s’il ne veut pas qu’on pense cela de lui. En plus, mes parents considèrent qu’il a pu simplement faire une erreur de jeunesse. Ça m’a beaucoup blessée puisque ça m’a donné l’impression que sentiments n’étaient pas valides. Qu’on pouvait détruire mes deux dedans, et que ce soit une simple erreur. Que j’étais jetable. Je ne crois pas que ce soit pour mal faire, mais ça a fait mal tout de même.
J’ai eu une bonne relation, avec une bonne personne. J’étais dure sur lui. On a pu rester ami, très pratique puisqu’on partageait le même cours.
Ensuite, J. s’est intéressé à moi. Il me demandait si j’étais la fille aux cheveux rouges du bar, la veille. Et que même si je ne l’étais pas qu’on pourrait se rencontrer. Je suis allée à ce rendez-vous, un couteau dans les bottes. Au cas. Ce n’est pas ce soir-là qu’il m’a violé.
Après sa prise de poids massive durant la deuxième année, soit 125 lbs, aussi l’équivalent de mon propre poids, je n’avais plus envie de lui. J’avais par contre toujours autant envie de sexe. Mais, parce que je suis une personne qui croit en la fidélité, je me suis mise à me masturber sans arrêt plutôt qu’aller voir ailleurs. Il s’est mis à se plaindre que je ne faisais plus rien avec lui, mais que j’avais tout de même envie de sexe. La suite fut un mélange d’agressivité envers moi pour ces raisons, et de la manipulation. Si je l’aimais, j’allais le désirer, quel que soit son corps… même si pour lui, si j’avais pris proportionnellement autant de poids de mon côté, ça aurait été une bonne raison de me laisser.
Donc, je devais faire mon devoir conjugal. Je devais lui prouver mon amour, même si je vivais notre relation de couple dans la peur, sans passion, sans intérêt. Et il me le demandait, de plus en plus manipulant, jusqu’à mon changement d’idées. Je faisais du sexe dans le dégoût et dans un sentiment de débarras.
La pire fois, et celle dont le souvenir est le moins flou… j’étais dans la chambre d’amis chez mes parents, et j’avais encore une fois dit oui pour qu’il me foute la paix. Moi, la nymphomane, je me regardais me faire abuser, dans les grandes portes-miroirs de la chambre. J’étais aussi lubrifiée que le Sahara. J’avais mal dans le vagin, je m’en voulais d’avoir accepté, et je lui en voulais de m’avoir réduit à ça.
Et dans toute cette année de viols conjugaux hebdomadaires, j’avais l’impression que j’étais le problème. Il avait réussi à me le faire croire. Je suis allée voir un médecin au sujet de ma lubrification devenue inexistante, qui me disait que je n’avais probablement pas assez de désir, et je lui répondais que ce n’était pas le problème, tellement j’essayais que ce ne le soit pas.
Quand je suis sortie de cette relation-là, je voulais au plus profond de moi me libérer sexuellement. Je voulais tellement vivre enfin une sexualité dont j’avais envie. Je voulais essayer avec une fille. Je m’en veux encore d’avoir oublié le numéro de cette belle brune que j’avais rencontré par des connaissances. Nous étions toutes deux intéressées à l’autre, et une de ses amies m’avait poussé à faire le premier pas. Elle était trop fatiguée ce soir-là, et devait absolument enlever ses verres de contact dans un court délai. On le voyait nous-mêmes par le rouge de ses yeux. Elle m’a donné son numéro. Malheureusement, je ne l’avais pas bien enregistré. La seconde fois qu’on se voyait, elle fréquentait régulièrement un homme. J’avais manqué ma chance, mais je l’avais tout de même séduite, ce qui avait fait du bien à mon estime.
Je suis sortie à plusieurs reprises, seule, dans le quartier gai, à la recherche de cette nouvelle expérience. Je suis malheureusement peu confiante et j’ai donc beaucoup de difficultés avec les premiers pas. Je suis déménagée en région avant de trouver cette expérience.
L’expérience d’une fille est toujours ma première recherche à chaque période de célibat. Mais elle est aussi la moins probable dans une petite ville. J’ai donc plutôt enchaîné les courtes relations avec les hommes.
Durant quelques mois, j’ai fréquenté un homme qui exigeait de moi dès le premier soir la totale fidélité, mais qui après six mois ne voulait surtout pas franchir le pas de m’appeler « sa blonde ». Il m’aurait laissé une semaine plus tôt, mais j’ai souffert d’une « gastro ». Puisque cela incluait des maux de coeur et des vomissements, il a eu peur d’une grossesse. Il m’a fait passer un test à la maison (acheté avant même d’arriver chez moi), et est entré au triage à l’urgence avec moi pour demander qu’un test de grossesse sanguin soit effectué. La semaine suivante, il me disait par Facebook qu’il allait me ramener ma clé, que c’était terminé. C’était la deuxième fois qu’il me l’annonçait sans me voir. La première fois, il m’avait beaucoup surprise, puisque deux minutes avant, il m’envoyait son adresse pour que je le rejoigne après le travail. Nous nous étions réconciliés après que je me sois tout de même dirigée vers chez lui, pour simplement l’entendre en face. Le fait qu’on me l’annonce de cette façon me faisait me sentir comme une moins que rien. Je ne méritais même pas qu’on prenne un moment pour me le dire en face.
Quand il m’a finalement ramené ma clé, j’avais souffert toute ma peine à la suite de ses messages. J’étais froide, je le haïssais. Je le haïssais d’être entré dans ma chambre pendant que j’étais à la salle de bain, quand nous n’étions plus ensemble. Mon INTIMITÉ. Je le haïssais d’avoir agi de la sorte durant sa peur d’une grossesse. Il s’était gardé mon corps pour lui quand il allait le jeter et le savait.
Et suite à cela, je ne cherchais plus rien. Ça allait arriver, ou pas. À chaque fois, je ne cherchais pas l’amour, je cherchais simplement le plaisir sexuel. Mais eux, ils me demandaient de cesser le condom, de me faire tester… d’être fidèle. Pour moi, c’était une grosse forme d’engagement. Pour eux, ils ne me demandaient rien et n’avaient donc rien à me donner en retour.
Je n’avais pas de problèmes à avoir plusieurs partenaires selon les soirs, toujours en rapports protégés, ce qui demandait peu d’attention pour chaque homme individuellement. Mais du moment où on me demande d’être fidèle, il me faut une grande attention pour être satisfaite. Il faut se voir, pour baiser! C’était comme demandé à un obèse de ne manger que la nourriture qu’on lui fait, et de le voir qu’une ou deux fois par semaine.
Et j’en ai fait, des choses, pour leur plaire. Je me suis fait faire des cunnilingus une fraction de fois comparée aux pénis que j’ai sucés pour leur attention. En fait le seul vraiment intéressé à me redonner ce plaisir, et même en faire une importance capitale, est presque le seul à l’avoir fait. Une bonne personne dans un tas de personnes qui demandaient sans donner.
J’ai donné mon attention, j’ai donné ma personne. J’ai fait tout ce qu’ils pouvaient demander au lit. J’ai accepté de ne pas utiliser de condoms quand j’aurais dû l’exiger. Heureusement, je m’en suis bien tirée, mais je le regrette amèrement. Je regrette surtout qu’on aie pu m’imposer ça, que je me sois laissée faire.
J’ai envoyé des photos de moi en petite tenue à des hommes qui n’étaient pas dignes de confiance, ou qui simplement ne méritaient pas que je leur en donne autant, pour la réciprocité inexistante.
T. réagissait mal si je ne lui répondais pas après cinq minutes. Même si je lui avais dit avoir un cours ou quelque chose, et que je ne pourrais justement pas répondre. Et un soir, pendant le sexe, j’ai commencé mes menstruations. Je n’y voyais pas un gros problème. Mais lui, vraiment. D’un seul coup, il était devenu froid. Je me sentais sale. Vraiment horrible. Après cela, il s’est mis à m’éviter. Le problème, ce n’était pas la fréquence, mais le changement de fréquence. Plusieurs jours sans nouvelles, quand j’en avais presque aux heures. Pendant ce temps-là, il contrôlait encore ma sexualité en ne voulant plus de moi, mais en ne me le disant pas. Au moins, s’il ne voulait plus rien, qu’il me le dise pour que je puisse trouver de nouveaux fournisseurs.
Un autre m’a demandé toute la semaine, vraiment de façon obsessive, que j’aille me faire tester à la clinique, et qu’on enlève le condom. Au bout de la semaine, soudainement, il voulait qu’on soit amis avec bénéfices, qu’il puisse aller voir ailleurs. Ce n’est pas que je tienne à la fidélité, c’est que ça se ressent comme un abandon, comme si on devait moindre.
Et chacun de ces hommes, individuellement, n’ont pas été plus méchants l’un que l’autre. Ils ont mal agi certes, mais c’est surtout l’accumulation. Je ne valais pas grand-chose, s’ils agissaient tous ainsi. Je me sentais comme une moins que rien, sale, grosse, laide… tout. Et j’ai fini par me punir, par vouloir revenir au monde réel. Ils pensent que je me coupais pour chacun d’eux individuellement, mais c<n’était pas accumulation.
Je valais quelque chose, quand je me sexualisais. Sinon, on ne me regardait pas. Mais je vivais bien avec ça, tant qu’on ne m’en demandait pas plus que ce qu’on est prêt à faire. Si on veut mon exclusivité, on doit faire un bout de chemin aussi. Et vu que personne ne veut de moi pour une relation, ce n’est certainement pas moi qui vais les convaincre d’essayer. Je suis bien à échanger d’homme plus souvent que mes draps.
Jusqu’à ce que ça devienne sérieux avec lui.
Il y avait longtemps qu’une personne m’avait plu comme ça sur le coup… depuis elle, dont j’avais perdu le numéro. Lui, il était là, avec son manteau de cuir, ses cheveux bleus, son attirail cousu au fil dentaire, les vieilles bottes moins percées que son visage, et ses lunettes qui lui donnait un air intello. Je le voulais juste dans mon lit, à ce moment-là, mais maudit que je le voulais. Mon courage n’a jamais été assez grand, et un ami qui le connaissait de vue nous a présentés. On s’est connu le temps d’une nuit, et il est parti. Je l’aurais revu de la même façon plusieurs fois, mais ça m’allait. On ne s’était rien promis, et on ne s’était rien demandé.
Entre temps, D. a refait des siennes. Lui que j’avais vu de façon très désordonnée. Prendre ce que je lui donnais, même si je lui avais expliqué que je ne voulais pas le faire dans le vide, pour lui ce n’était pas profité de moi. J’avais fait mon deuil, il est revenu faire du mal. Parce que voyez-vous, il avait besoin d’annoncer que j’étais une folle à chaque fois qu’il prenait des fausses nouvelles pour bien paraître. À chaque fois il disait qu’il n’allait jamais me reparler.
Et il y en a eu d’autres. Jusqu’à ce que je revois N. Et je n’ai plus revu personne d’autre que N.
La réalité, c’est qu’en ayant eu aussi peu de respect de la part de divers acteurs sexuels de ma vie, j’en suis venue à diminuer mon corps. À lui enlever sa valeur. Sa valeur, elle est purement utilitaire. Pour moi, et pour avoir ce que je veux.
Il faut comprendre… si mon corps ne vaut rien, on ne m’a rien volé. Et s’il ne vaut rien, à quoi bon mettre des efforts pour le protéger. Le problème, c’est que mon copain, lui, en voit la valeur. Autant ça fait du bien que quelqu’un y attache une importance, autant ça me met dans une prison… et que ça me donne une arme.
Je n’ai pas le contrôle sur beaucoup de choses de moi. Je suis comme un volcan prêt à exploser en tout temps. Mais j’ai le contrôle sur mon corps. Mon corps qui ne vaut rien, mon corps qui vaut quelque chose pour lui. Ce n’est pas une bonne balance de pouvoir, mais la personne que je suis en dissociation ne cherche pas à agit sainement. Elle cherche à faire mal, parce qu’elle a mal. À crier parce qu’elle pense qu’on ne l’écoute pas. Elle veut que quelqu’un la voie. Que quelqu’un vienne l’utiliser, parce qu’au moins là, elle existerait, elle ne serait pas seule, elle n’aurait pas à écouter son vide.
Ce qu me détruit, c’est le retour à moi-même. Je me réveille au beau milieu d’un fouillis que je ne comprends pas. Quelqu’un m’a montré, quelqu’un m’a coupé, quelqu’un m’a donné ce mal de tête. Quelqu’un m’a fait perdre une personne, une occasion, ou juste ma tête.
Et même cette personne-là, contrairement à plusieurs personnes partageant mon trouble, elle a beau ne pas avoir de grande gêne en se vengeant par sa propre nudité, elle a tout de même aucune notion d’infidélité. Si elle veut aller ailleurs, elle va s’arranger pour être célibataire. Elle va tout détruire, tout saboter, mais elle va être libre. Mais N. ne me croit pas. Parce que je ne ferais pas vœu de célibat de façon régulière pour la paie dans le Nord. Parce que je ne me rendrais pas malheureuse la moitié du temps pour de l’argent. Parce que je le sais que je serais malheureuse. Je l’ai assez été, je le suis encore trop, et je ne me sens pas sortie du bois… aussi bien ne pas faire exprès.
Et au fond, le problème, c’est que je me demande si un jour ça sera différent. Si un jour je ferai autre chose que choisir toujours le plus petit des malheurs. Si un jour je réussirai à être bien. Et c’est là que je me demande si ça vaut la peine de continuer.